Les dernières heures, pour ne pas dire les derniers jours, avaient été éprouvant pour l’impassible reine des glaces en charge de la forteresse de Briggs. Elle avait négligé le repos nécessaire au rétablisse de ses côtes. Elle devait sa blessure au passionnant combat qui l’avait opposé à l’alchimiste de glace quelques jours plus tôt. Avant qu’il ne parte en mission. Elle avait eu sans trop de peine le dessus sur lui. Mais elle avait sous-estimée certaines de ses capacités. Cette erreur lui avait valu quelques côtes fêlées. La douleur était néanmoins supportable. Du moins quand elle acceptait de se tenir tranquille. Or, les dernières heures n’étaient pas au repos.
Maintenant que les membres de la section 9 en charge de la mission sauvetage, ou plutôt suicide au goût de la blonde, étaient de retour, le général Armstrong pouvait envisager un peu de repos. Seulement, elle ne pouvait pas confier les tâches qui lui incombaient à son second. Pas si elle était présente en ces lieux. Elle venait de recevoir le lieutenant-colonel Griffin dans son bureau pour avoir un rapport complet et détailler de leur mission. Comme elle s’en était rendu compte à leur retour, ils avaient échoué. Cela ne l’avait pas surpris. Dès les premiers instants de leur rencontre, quelques jours plus tôt, la reine des glaces avait fait part au jeune lieutenant-colonel de ses craintes. Elle connaissait Drachma. Ils avaient la même mentalité que les occupants de la forteresse de Briggs. Ils ne faisaient pas ou peu de prisonniers. Les ennemis étaient exécutés sur l’heure. C’était une règle fondamentale de survie dans ses contrées difficiles.
Les vivres y étaient rares et précieux, quel que soit leurs qualités gustatives. Et on ne pouvait pas se permettre de la partager avec un ennemi. On prenait les informations, et on l’éliminait. Cruel ? Mais il n’est pas donné à tout le monde de pouvoir vivre dans ces contrées hostiles.
Bien qu’elle se soit pris une journée de repos et de détente au départ de l’expédition suicide, la dame de fer avait à nouveau accumuler la fatigue pour pouvoir accueillir les membres de cette unité. Cette fatigue rendait la blond un peu plus sensible au froid ambiant de la forteresse. Si, comparée à l’extérieur, les couloirs semblaient plus chauds, c’était uniquement parce que les murs épais de l’infrastructure protégeaient un peu. Cependant, les rares lieux chauffés étaient les dortoirs, l’infirmerie, et le réfectoire. Olivia se dirigeait vers ce dernier lieu. Elle n’avait aucune intention de se reposer. Elle voulait être disponible à tout moment pour ses invités en cas de besoin. Quant à l’idée d’aller à l’infirmerie pour s’entendre dire qu’elle devait se reposer et réduire sa consommation de café, très peu pour elle. Elle commencerait à suivre ce genre de conseils quand elle aura remis au train pour centrale les trois troubles fête. Pas avant. Il ne lui restait donc plus qu’un dernier lieu chauffer à occuper.
Cela faisait déjà un moment qu’elle avait congédier le Frozen de son bureau. Elle était restée tout ce temps dans son bureau à réfléchir à la situation, sans toutefois apercevoir un semblant de logique. La blonde n’aimait pas cela. Mais soit, en attendant d’avoir plus d’éléments, elle devait continuer à agir comme elle l’avait fait jusqu’à présent.
Alors qu’elle cheminait avec détermination en direction d’un ravitaillement de café, le général Armstrong fut interpelée par le médecin de la forteresse. Se plaignant du mauvais traitement qu’elle accordait aux infirmier. Mais jugeant assez rapidement de l’humeur de la maitresse des lieux, le médecin fila sans demander son reste. Pour se calmer, la blonde changea de direction. Elle se rendit sur les remparts de la forteresse afin d’y admirer le splendide paysage de neige immaculée. Malgré le froid extérieur, et le vent glacé qui soufflait à cette hauteur, Olivia profitait du calme. Elle le trouvait reposant. Debout, droite, fière, les cheveux aux vent, elle respirait cet air pur à pleins poumons.
∎ Localisation : Hôpital militaire de Central City.
∎ Fonction : Médecin chef de l'armée, officieusement séparatriste.
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Adair Fletcher
Un bol d'air frais
- Vous souhaitez que j’apporte un second avis médical pour la générale Armstrong ? Demanda-t-elle en plissant légèrement les yeux.
Le médecin de Central croisa les bras avant de s’adosser contre le dossier, jugeant à tour de rôle les infirmiers dont l’expression se confondait en désespoir et en gêne : une requête formulée qui avait déjà des allures de défaites à les voir. Elle soupira non sans discrétion, avant de lever la main pour les arrêter dans leur supplication :
- Je ne vois pas en quoi mon avis, même éclairé, puisse la convaincre… D’autant plus que je suis une étrangère et que votre patiente est une… un cas… disons difficile, rien avoir avec son frère, le commandant Armstrong, dit-elle en tirant sur les plis de son uniforme.
Non vraiment, Adair ne voyait pas en quoi elle pouvait changer la donne et parfois laisser un prédateur blessé n’était pas plus mal. D’ordinaire, elle ne rechignait pas au challenge de faire plier un patient trop fier ou trop têtu, mais il ne s’agissait que de côtes fêlées.
- Par ailleurs où est votre médecin ?
Ces derniers lui répondirent qu’il était parti à la rencontre de la générale, Adair acquiesça d’un mouvement de tête pour dire qu’elle avait entendu, avant du balayer du regard les étagères, où se trouvaient divers contenants et produits. Cependant, elle finit par se lever voyant qu'elle n'avait plus grand chose à faire ici.
- N'attendez rien de moi, lâcha-t-elle avant de s’engouffrer dans le couloir.
Elle rajusta brièvement le col de sa veste d’uniforme au passage et partit en direction des remparts. Ce n’était autre qu’un petit détour avant de rassembler le reste de ses affaires pour son retour à Central. Gravissant un escalier pour s'y rendre, ce fut seulement en montant la dernière marche qu’elle vit la maitresse de Briggs contemplant l’horizon. Quelle ironie, à croire que le destin la poussait à venir en aide à ces pauvres infirmiers. Adair analysa rapidement la situation avant de s’approcher, le son de ses pas étant audibles :
- Mes salutations, générale Armstrong, dit-elle d’une voix distincte tandis qu’elle coinçait une mèche de cheveux prise dans le vent derrière son oreille.
Ayant connaissance que cette dernière était à cran, la jeune femme trouvait pertinent de garder une distance de sécurité. Non pas qu’elle s’attendait à se faire sabrer ou jeter par dessus des remparts, mais la méfiance la poussait à adopter une froide politesse qui en fin de compte n’était pas sans rappeler l’attitude des habitants de la région...
Le général de brigade Olivia Mira Armstrong contemplait l’horizon en direction de Drachma. Bien que l’équipe chargée d’infiltrer les lignes ennemies en vue de récupérer des hommes étaient rentrées saine et sauve, l’affaire n’était pas finie pour autant. D’une part parce qu’ils avaient échoués. Cela impliquait la mort des captifs. Ensuite, ils étaient revenus dans des tenues de l’armée adverse. Drachma finirait bien par découvrir les corps des trois soldats tués pour cela. Olivia s’était depuis longtemps préparée à une contre-attaque de Drachma concernant cette affaire. C’est pourquoi, après le retour de la section 9, elle n’avait pas réduit l’effectif des sentinelles sur les remparts. Pour l’heure, aucun mouvement suspect de la part de Drachma n’avait été signalé. Ce n’était pas une raison pour relâcher la vigilance. Et en tant que général de Briggs, La reine des Glaces ne pouvait pas se permettre de se reposer tant que cette affaire ne serait pas entérinée.
La blonde avait planté son épée devant elle, entre ses jambes. Cela lui permettait de rester droite sans trop fournir d’effort. Elle n’était quand même pas stupide pour aggraver la douleur alors qu’elle était susceptible de partir combattre Drachma à tout instant. Ni au point de prendre des médicaments qui la laisserait K.-O., et par conséquent, inapte au combat. Elle n’avait jamais failli en cas de coup dur à la forteresse, et aujourd’hui ne serait pas une première. Sinon cela revenait à avouer à ses hommes qu’un petit alchimiste avait réussi à la blesser lors d’un entrainement. Cela était impensable pour le bloc de glace qu’elle était.
Captivée par le paysage, la dame de fer n’entendit la nouvelle arrivante que lorsqu’elle prit la parole. Olivia n’avait jamais entendu la voix de cette femme. Tout en resserrant sa prise sur son arme, la blonde tourna les yeux vers la voix. Renaissant le médecin qui accompagnait l’horloger pour la mission, la reine des glaces se détendit et repris sa position initiale, le regard à nouveau fixé sur l’horizon.
- Vous venez admirez la vue ou céder aux caprices de quelques pleurnichards… ?
La blonde avait, bien sûr, remarqué que la jeune femme se tenait à distance. Serait-elle comme la majorité de ses militaires ? Des froussards face à une femme de poigne ? Venant d’une personne spécialement choisie par le Frozen, Olivia était déçue. Elle s’attendait à voir une femme de la trempe du lieutenant Hawkaye.
- Drachma ne semble pas avoir découvert votre fuite pour le moment… Pensez à vous reposer nous aurons probablement besoin de vos services dans les prochaines heures.
Le général Armstrong n’avait pas tourné la tête pour dire cela au médecin. Elle ne s’était pas non plus embêter avec un quelconque protocole. Ses paroles étaient certes dures et froides, mais elles n’étaient pas colériques. Bien au contraire, le timbre de voix de la blonde était posé et rationnel. On pouvait même déceler une pointe d’excitation concernant les évènements à venir. La reine des glaces espérait enfin rentrer en action. Elle attendait les représailles de Drachma pour s’amuser un peu.
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Adair Fletcher
Un bol d'air frais
Voyant que l’héritière des Armstrong semblait accepter son intrusion, Adair se rapprocha d'un pas mesuré et tâta le col de sa veste pour s’assurer que ce dernier était bien fermé, sentant le vent froid du nord lui fouettait le visage. Puis son regard miroir parcourut l’étendue de glace et de neige, silencieuse observation qui laissèrent place à un blanc. Aucune émotion ne lui vint à ce moment là en voyant ce paysage à perte de vue. Elle finit par retourner son attention sur la générale pour lui répondre :
- Il est vrai que vos infirmiers n’ont pas su garder leur langue dans la poche quand je suis passée les voir, dit-elle avec un sourire légèrement narquois. N’ayant crainte, je ne suis pas venue plaider en leur faveur, et ce n’est pas comme si vous étiez à bout de force.
Adair n’avait pas l’intention de la plaindre de quoique ce soit. Si la fatigue et la douleur lui étaient tolérables, grand bien lui fasse, elle n’était pas là pour la réprimer de son comportement. Le médecin se frotta brièvement les paumes des mains. Ces dernières étaient gantées et offraient une protection supplémentaire contre le froid.
- Je suis venue prendre l’air. Il est plus agréable de contempler Drachma d’ici que de ses égouts pour être honnête, répondit-elle une seconde fois d’un ton qui ne trahissait aucun sentiment négatif.
Et dissiper l’odeur de tabac froid qui avait imprégné ses vêtements, mais ce détail elle le gardait pour elle. Elle eut un mouvement de la tête de droite à gauche pour voir l’ensemble des remparts visibles et aperçut les sentinelles qui se tenaient prêtes au moindre mouvement du belliqueux voisin. Après les attentats du grand examen d’alchimistes, attentats soi-disant menés par Drachma, la jeune femme n’était pas surprise de voir que Briggs redoublait d’effort pour garder la frontière.
- La guerre vous semble-t-elle imminente ? Il y avait quelque chose de las dans la voix d’Adair, un ressentiment qu’elle ne put étouffer, tandis qu’elle porta sa main droite au-dessus de ses yeux pour les soulager de la lumière du soleil.
- Nous sommes constamment en guerre. Mais ici ce n’est pas ce que vous avez pu connaitre ailleurs... Ces montagnes ont leurs propres règles… Si vous ne les suivez pas vous aller droit à la mort.
La blonde se demandait si elle avait bien su faire passer ce message au lieutenant-colonel Griffin quelques jours au paravent. Et si ce n’était pas ce manque de connaissance de la montagne qui leur avait couter cet échec. Elle aurait sans doute dû insister pour qu’un de ses hommes rejoigne l’équipe. Elle savait qu’un groupe de plus de trois personnes avaient beaucoup plus de chances de se faire repérer... Elle ressassait cela depuis qu’ils étaient rentrés, signant ainsi l’échec de leur mission.
- Avec Drachma, nous nous affrontons régulièrement. Ce sont d’avantage des batailles qu’une guerre à proprement parler…
Explique-t-elle au docteur. Elle n’allait pas rentrer dans les détails qui lui faisait douter d’une réelle guerre. Comme par exemple le fait que Drachma était bien plus souvent en position défensive qu’en position offensives. Le nombre minime de morts des deux côtés aussi était assez surprenant. Certes la montagne était un terrain difficile. Les batailles devaient se dérouler selon certaines conditions météorologiques. Mais ce n’était pas suffisant pour justifier les faits. Cela faisait déjà un moment que cette attitude tracassait la reine des glaces. Elle avait parfois l’impression d’être l’assaillante, et non l’assaillit. La dame de fer doutait de plus en plus de la version officielle concernant l’attaque de central. Pour elle s’était impossible que Drachma en soit à l’origine. Mais elle ne pouvait pas en parler à n’importe qui. Et encore moins à une personne travaillant à central en temps normal.
- Ce matin les conditions ne sont pas optimales, mais pas médiocres… Une attaque n’est pas impossible…
Précisa le général Armstrong. Elle remuait les jambes comme si elle semblait n’attendre que cela. Pendant tout ce temps, elle n’avait pas décroché une seule fois son regard de ce paysage immaculé. Le soleil caressait la cime des montagnes tandis que le ciel perdait peu à peu sa teinte rosé du matin. Une légère brise portait quelques flocons sur les hauteurs de la forteresse. Certains se prenaient dans les cheveux de la blonde. A Briggs, c’était l’hivers toute l’année. Le vent allait redoubler d’intensité d’ici quelques heures. Si Drachma devait attaquer ce serait sous peu. Sinon, ils opteraient probablement pour une infiltration. Quoi qu’il en soit, Olivia les attendait le pied ferme.
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Adair Fletcher
Un bol d'air frais
Adair regarda en biais le général Armstrong en entendant que ces montagnes avaient leurs propres règles :
- Dois-je comprendre que nous avions de la chance de revenir de Drachma ? Demanda-t-elle d'un ton prononcé qui appuyait le sérieux de sa question. Question qui avait par ailleurs un but caché...
La chance était une variable, mais ce n'était pas la seule qui pesait dans la balance, même si le reste pouvait paraître moindre face à la taille du danger. L'avenir n'avait rien de prévisible, au contraire, il se divisait en d'innombrables ramures, dont le cheminement pouvait d'un moment à l'autre bifurquer et déstabiliser toute personne qui aurait voulu le prédire.
Détournant le regard quelques secondes du paysage, Adair se demandait quelles allaient être les retombées de la mission qui venait d'échouer. Même si depuis des années les nations ennemies se regardaient en chien de faïence, aujourd'hui l'une comme l'autre semblaient plus qu'attendre la violation du traité de non-agression. Qui sait ? Le point de rupture avait peut-être était franchi dans l'ombre de la forteresse, sur le chemin de leur retour. Elle soupira discrètement avant de porter son regard au plus loin, sans toutefois parvenir à saisir l’immensité du plan.
- C’est différent oui, bien que je n’en sois pas toujours témoin. Un médecin n’a pas sa place au front après tout, sauf dans certains cas. En tant que membre d’une unité de chirurgicale mobile, j’ai assisté à certains événements en me trouvant juste derrière celle-ci. Toutefois je le reconnais, dans ces montagnes, j’irai droit vers une mort certaine.
La soignante croisa les bras, tandis que le vent du nord jouait avec les mèches qui encadraient son visage. Le froid était un ennemi déjà difficile à appréhender même dans le plus grand des calmes. Elle préférait le chaud, bien que plus discret et insidieux, quand on connaissait les conséquences.
- J’ose espérer que ça ne sera pas le cas aujourd’hui, avait-elle fini par rajouter en plissant légèrement les yeux, même si j’ai l’impression que vous les attendiez…
Le général Armstrong se renfrogna à la question du médecin militaire. Elle tourna très légèrement la tête en direction de cette femme, lui jetant au passage un regard dur et glacial. Elle se demandait bien ce qu’espérait cette femme en la questionnant ainsi. Elle lui répondit d’une voix tout aussi glaciale que le vent.
- Les chances n’étaient pas toutes de votre côté, et ce malgré votre très bonne préparation…
Elle devait le concéder. L’homme qui avait diriger cette équipe c’était préparer au mieux. Il avait bénéficié de tous les conseils de terrain possible. Elle y avait veillé en chargeant Miles de répondre à toutes les sollicitudes. Malgré cela, les efforts n’avaient pas pu contrer le mauvais sort. Mais ils étaient rentrés tous les trois. Ils n’auraient pas d’autres hommes à déplorer. Pour cette fois. La reine des glaces en était soulagée malgré son apparente sévérité.
Cette femme semblait prendre l’échec de leur mission bien moins à cœur que le jeune alchimiste. L’âge aidant surement. Car elle était plus âgée de trois ans. Mais plus la blonde discutait avec le docteur Fletcher, plus une sensation étrange l’envahissait. Comme si cette femme cachait quelque chose. A moins que cela soit le fruit de son imagination. Olivia avait tendance à se méfier un peu trop vite des individus qui ne correspondait pas à ses critères de valeurs. Et par définition, un médecin n’était utile que lorsque les blessures pouvaient être soigner rapidement. En dehors de ce fait, ils devenaient une entrave. C’était surement le fait qu’elle soit médecin qui dérangeait la maitresse des lieux. Car en d’autres circonstances, elle aurait probablement apprécié discuter avec elle.
La reine de glace reporta son attention sur les montagnes. Le vent jouait avec ses longs cheveux blonds, les pans de son uniforme et le long manteau au col en fourrure qu’elle portait sur les épaules. Les manches de ce dernier, qu’elle n’avaient pas enfilées, virevoltait avec le reste au gré du vent. Ses mains ferment posées sur le pommeau de son épée, elle écoutait la jeune femme.
- Tout le monde n’est pas fait pour vivre ici…
Répondit-elle simplement. Elle s’était retenue d’ajouter qu’elle n’avait pas pour coutume d’accepter des bouches inutiles. Mais cela n’aurait nul autre effet que de témoigner un certain rejet de cette femme. Hors, ce n’était pas le but recherché. Même si à la base, la blonde avait cherché le calme des montagnes pour se ressourcer après les assauts incessants du corps médical de la forteresse. Elle avait souhaité pouvoir s’entretenir avec chacun des membres de l’expédition pour s’assurer qu’ils supportaient leur échec. L’occasion lui était donné de s’assurer de cela.
La dernière phrase de la jeune femme, bien que semblant chargée de reproche, fit sourire la maitresse des lieux. Pas de ses sourire poser qui marque une satisfaction sereine, mais un sourire carnassier dont la blonde avait le secret. Un de ses sourire qui transpirait l’excitation, que dis-je l’exaltation du combat. Jetant un regard de biais, passionné vers son interlocutrice, Olivia répondit d’une voix qui trahissait sa passion de la guerre.
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Adair Fletcher
Un bol d'air frais
La générale était devenue un instant le reflet même de sa forteresse et de son territoire en lui répondant. Réprimant un sourire énigmatique à ses paroles, le médecin dût reconnaître que la chance les avait sans doute fait revenir en ce lieu plus rapidement. Toutefois, elle n’oublia en rien les compétences des hommes qu’elle avait accompagné dans ce périple, à travers cet enfer de neige et de glace.
- Je vous crois, répondit-elle tout simplement à ça sans sourciller, alors qu'elle chassait d'une main las une mèche de cheveux prise dans le vent.
Adair resta de marbre face à l’enthousiasme de la blonde pour le combat. En vérité, la jeune femme n’approuvait pas. Quand un homme gravement blessé mourait être ses mains, la seule chose qu’elle pouvait lui accorder était de courtes paroles de réconfort. Parfois, la colère ou l’affliction embuait son esprit, et à ses mots se rajoutèrent une promesse solennelle teintée de vengeance ou de rédemption. Fragment d'un espoir ténu, que nul autre qu'elle pouvait l'entendre et s'en rappeler.
- Nous avons sans doute une définition différente de l’amusement, lâcha le médecin abruptement à son interlocutrice en la regardant sans aucune animosité, mais qu’importe… Mon seul devoir est de soigner ceux qui peuvent l’être, d’apaiser ceux qui sont perdus et de retranscrire les dernières volontés qui me sont données. Quoiqu’il advienne, en attendant notre retour pour Central, vous pouvez compter sur moi pour m’occuper de vos soldats. Je n'ai pas l'intention de faillir.
Une affirmation qui sonnait aussi claire que le glas.
- A défaut de vous convaincre d'écouter vos infirmiers, termina-t-elle d'une voix toute aussi claire.
Un demi-sourire vint naître sur ses lèvres en repensant à leurs lamentations. Au moins ces derniers se montraient sérieux dans leur démarche, bien que désespérés. C'est que la générale, malgré son air dur, ainsi que ses colères explosives, avaient la confiance de ses hommes et pour cela, Adair avait un certain respect pour elle.
Le général Armstrong ne put réprimer une grimace à la dernière phrase du docteur Fletcher. Elle remettait sur le tapis les lamentations de ces privilégier. Car oui, pour Olivia, les infirmiers et les médecins étaient les mieux lotis dans la forteresse. Ils étaient les seuls à passer leurs journées dans un environnement chauffé, passant de l’infirmerie au réfectoire et aux dortoirs. Le reste de la forteresse étant soumis aux courants d’air. Ils n’étaient pas soumis aux même contraintes que les autres soldats. Par conséquent, elle avait du mal à supporter leurs lamentations.
- En tant que soldat… Accepteriez-vous de suivre un officier qui resterait à l’arrière sous prétexte qu’il s’est très légèrement blesser à l’entrainement ? Que penseriez-vous d’un tel comportement si vous vous prépariez à affronter l’assaut d’un ennemi aussi redoutable que Drachma ?
Pour dire cela, la blonde s’était entièrement tournée vers le médecin militaire. Elle avait attrapé son épée de la main gauche pour poser la lame sur ses épaules. De ses yeux bleus, et de toute sa hauteur, la reine de glasses toisa son interlocutrice.
- Ma place est en première ligne, à guider ces valeureux guerriers. Quel officier peut demander le sacrifice ultime à ses hommes sans mettre sa vie en jeu pour les épargner ?
La blonde porta son regard sur le sommet des montagnes enneigées qui entouraient la forteresse. Elle ne se lassait jamais de ce spectacle. Son regard se voila un instant.
- Je n’ai pas à me justifier devant vous. Mais comprenez que ma position ne me permet pas de céder aux caprices d’infirmiers trop zélés. Au nom de tous ces hommes tombés sur le champ de bataille, je ne peux pas me défiler.
La voix du général Armstrong s’était faite plus douce, plus mélancolique. Elle avait gravé dans sa mémoire et dans son cœur les noms de tous les hommes tombés sous son commandement. Pour eux, au nom de leur sacrifice, la forteresse ne tombera jamais. Elle s’y était résolu. Bien d’autres viendrait à mourir. Peut-être sera-t-elle parmi eux. Qu’importe. Tous ici, à Briggs, vivaient pour ces instants de combats. Craignant davantage pour la vie de leurs camarades que pour la leur. Tel était la particularité de la forteresse. Bien sûr, tout le monde ne pouvait pas comprendre ce point de vue.
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Adair Fletcher
Un bol d'air frais
Pour le médecin, le général en faisait un peu trop à son goût. Ça et l’aspect dramatique qui accompagnaient ses paroles, mais elle devait reconnaître qu’elle avait une certaine estime pour cette femme qui ne l’oublions pas avait réussi à s’imposer dans la fosse à requins qu’est le haut du panier de l’état-major. Nul doute que ce diamant à l’apparence brut avait su séduire plus d’un malgré sa rudesse et la jeune femme comprenait l’inquiétude que pouvaient lui porter certains de ses hommes.
- J'imagine que vous voulez entendre le terme "couard"... Déclara-t-elle d'un ton neutre à la définition du comportement.
Son regard qui s’était posé sur l’héritière des Armstrong le temps de sa réplique, dévia pour reprendre la contemplation de l’horizon. Ce dernier se faisait presque soporifique malgré le danger qui se trouvait dans le fond. Cependant, son esprit s’adonnait à une nouvelle réflexion : le prix d’une vie, le résultat d’un sacrifice… Sous la réflexion, Adair avait croisé les bras avant de reprendre :
- Tous les sacrifices ne se valent pas et certains ne font que tenir l’espoir, mais je doute que vous soyez facile à faire tomber, accorda le médecin sur son état qui restait surmontable.
Même si elle n’avait jamais vu le général à l’œuvre, elle avait rajouté à son analyse sa réputation et sa position pour partager son impression.
- Je ne vous demande aucune justification et je ne cherche pas plus à vous soigner bien que ma fonction m’inciterait à le faire, répondit-elle sans une once de vexation. Votre équipe médicale doit suffisamment vous connaître pour savoir battre en retraite le temps venu, autrement j’imagine qu’ils auront droit à vos foudres.
Rabattant d’une main ferme un pan de son uniforme qui s’affolait dans le vent, Adair avait convenu avec elle-même qu’elle avait mené à terme sa mission auprès du général. Ce n’était pas le genre de confrontation qu’elle préférait et elle n'y trouvait son compte sur ce cas là. Non, la lutte pour préserver une vie vacillante lui importait bien plus.
Couard, lâche, pleutre, et autres termes étaient effectivement un qualificatif du comportement des généraux qui se réfugiaient derrière leurs hommes. Tous ce qu’elle exécrait. Mais ce n’était pas vraiment la définition exacte. Pour elle, ce genre de comportement n’était pas digne d’un officier. Il n’était même pas digne d’un être humain. Quel être pouvait rester sans rien faire quand ses semblables se faisaient massacrer ? Le genre humain était-il vraiment aussi pourri ? Elle se refusait de croire cela. C’est pourquoi elle continuait toujours de se battre. Pour toutes ces vies qu’elle avait à protéger en étant à la tête de cette forteresse.
- La couardise n’a rien à voir… Elle n’est que le fruit d’une conviction ébranlable… On ne peut pas avoir peur quand on croit à ce que nous faisons…
Olivia porta son regard sur la jeune femme. Pouvait-elle vraiment lui faire comprendre sa vision du monde ? Son adversaire, l’officier qui dirigeait les troupes de Drachma, qu’elle affrontait régulièrement, avait la même vision qu’elle. Pour cela, elle le respectait profondément, et ne lui ferait jamais faux bond pour une bataille. Mais est-ce que ce médecin était de cette trempe ? Avait-elle la force de ses convictions ? Le général Armstrong ne parvenait pas à le déterminer en observant la jeune femme. Des propos du médecin, la reine des glaces conclue, sans doute à tort, que non. Elle fronça le sourcil et serra les dents pour contenir sa rage avant de reprendre d’une voix claire, ferme et sans appel, ses yeux jetaient des éclairs.
- Une vie est une vie. Pourquoi ma vie aurait-elle plus de valeur que la vôtre ou que celle de n’importe quel soldat ou civil ? Je ne laisserai personne salir la mémoire de mes hommes. Pas même vous.
Derrière cette rage apparente, la blonde cachait une sensibilité que peu de personne n’avait su décelé jusqu’à ce jour. Certains avaient pu avoir un aperçu tout en se retrouvant déstabilisé face à cette femme qui soufflait le froid et le chaud. D’autres avaient fait fit du feu que soufflait ce rock de glace pour en percer le cœur. Mais un seul subissait continuellement les foudres de celle qu’il vénérait pour sa tendresse : Alex. Olivia renvoyait la même quantité de haine à son frère qu’elle ne recevait d’amour de sa part. Pourtant, elle était la première à venir le défendre au besoin. Seule elle se réservait le droit de le martyriser.
La reine des glaces ne pris pas la peine de répondre au médecin vis-à-vis de l’équipe médicale de Briggs. Cette équipe était une des plus compétentes du pays. Et c’était bien parce qu’elle en avait conscience qu’elle pouvait tirer sur la corde de temps à autre. Elle avait prévu de se reposer, oui, mais après le départ pour Central des membres de l’expédition d’infiltration. De tout façon, pour prendre ces médicaments, elle devait attendre la fin des effets du café. C’était aussi pour cela que la blonde était monté prendre un bol d’air frais. Pour se maintenir éveillée sans caféine.
- Je présume que vous êtes déjà sur le départ…
Lança la blonde en tournant le dos au médecin. On pouvait entendre un vague « je ne vous retiens pas » à peine dissimulé. Cette fois elle regardait en contrebas de la forteresse, coté Amestris. Des véhicules se préparaient à quitter le site. Elle les regarderait partir d’ici. Les « au revoir » n’étaient pas du goût de la maitresse des lieux.
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Adair Fletcher
Un bol d'air frais
Le médecin reconnaissait un certaine validité dans la définition que lui donna son interlocutrice. Encore fallait-il être se montrer suffisamment intelligent pour assumer, autrement l’absence de peur pouvait prendre facilement le pas sur l’imprudence. Une réflexion qu’elle préféra garder en son esprit.
Elle retourna son attention sur la reine des Glaces, ne se privant pour observer sa réaction sur sa déclaration au sujet des sacrifices, tout en subissant son souffle glacial. Néanmoins, cela ne l’avait pas découragé à partager sa vision des choses :
- Une vie est une vie ? Ca serait ignorer notre humanité dans ce cas : nos désirs, nos peurs, nos passions, nos convictions, nos ambitions… Le destin sait se montrer pernicieux quand il veut obtenir quelque chose de nous en nous forçant à faire des choix. C’est pourquoi je n’y crois pas. Déclara poliment le médecin et ce, malgré les propos furieux du général, bridés par un ton sans appel.
S’il est vrai que la maîtresse de Briggs savait se montrer intimidante, Adair restait quant à elle solidement accrocher à sa réflexion. De plus l’expérience qu’elle avait acquis ses dernières années pour gérer des patients colériques et ombrageux l’aidait à garder sa contenance, qui parfois pouvait s’apparenter à de l’insolence...
- En effet, le trajet sera long jusqu’à Central… Bonne convalescence général.
Alors que l’héritière des Armstrong lui tourna déjà le dos, la jeune femme balaya une dernière fois l’horizon avant de partir pour rejoindre l’alchimiste de glace qui devait l’attendre plus bas vu l’heure.
Le paysage n’allait pas lui manquer. Et encore moins le café du réfectoire...
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