J’étais impatient d’avoir les réponses à mes questions. Mais je me montrais étrangement calme et posé. Recrachant la fumée de ma cigarette en direction du ciel, comme si notre discussion était des plus banale et ennuyeuse. Je note tout de même qu’il fume là sa première cigarette. Soit il laisse tomber immédiatement, soit il en deviendra dépendant prochainement. Cette dernière possibilité me fait sourire alors que je porte à mes lèvres ma cigarette pour tirer une nouvelle bouffée.
L’est et le nord. Deux lieux où de toute façon je n’aurais pas cherché. Pas après t’avoir rencontré lieutenant. Le nord, parce que la blonde ne m’aurait pas laissé chercher chez elle sans rechigner. J’y ai déjà laissé la moitié de mon visage. Et je ne doute pas une seule seconde, qu’elle n’hésiterait pas à me tailler en pièce pour je ne sais quelle raison. L’est, si tu y es, et si ta fiancée ne m’a pas mentit, il y a peu de chance qu’il y soit. Tu n’aurais pas accepté d’y resté s’il y était. Pas après avoir vu ta réaction. Mais je me pose une question. Tu es vraiment soldat ? Comment peut-on être aussi… Aussi déconfit à la seule mention d’un massacre auquel on a participé et rester dans l’armée qui l’a ordonné ? Il faut être d’accord avec les actes, ou être givrer pour rester ! Bon, il se trouve que moi, je suis givré. Mon but est de trouver la faiblesse de ce pays pour l’anéantir. Je participerais donc à autant de massacre que nécessaire, pourvus que l’avantage soit pour moi.
Le lieutenant est vraiment en Etat de choc. Je n’obtiendrais plus rien de lui. Pas même des noms supplémentaires. Très bien. J’accepte. A la base, je rentrais juste de ma dernière mission de traducteur sur un poste avancé avant de prendre mes nouvelles fonctions au sein de la section 9, à Central. La nuit tombait, je me suis arrêté. J’ai passé du bon temps. Le reste était un plus.
Je dois quand même avouer que ce plus me laisse un goût amer dans la bouche. Je n’ai qu’un nom sur plusieurs individus. Cet homme payera personnellement. Les autres, nous les exterminerons avec ce pays.
Je me passe une main dans ma chevelure rousse, resserre mes doigts au contact de mon crane et lâche un soupir.
- Ce n’est pas grave Lieutenant. Je vous remercie pour votre aide précieuse. Je vous promets qu’à notre prochaine rencontre, nous partagerons un verre avec le sourire.
Je lui tourne le dos et m’éloigne de cette bicoque en lui adressant un signe de la main par-dessus mon épaule, sans me retourner. Je ne laisse rien sous-entendre sur sa fiancée. Je pense, au vu de son comportement, qu’elle se sent déjà coupable de ce petit moment de plaisir charnel. Je ne veux pas l’embarrasser plus. Je suis pour la paix des ménages, après tout…
Un cheval est attaché non loi. Je le détache et monte dessus. Puis le lance au trot jusqu’à la sortie du patelin. Puis au galop. Ce n’était pas mon cheval, j’ai fait route dans la calèche d’un local qui rentrait chez lui. Mais cette bête, déjà harnachée, est belle et vaillante. Elle me permettra de rejoindre un ville plus importante, avec des trains plus réguliers. Je n’avais pas non plus payé mes consommations.
Sous ton œil vitreux, le Major semble se perdre dans ses pensées. Tu continues donc d’inhaler le produit de combustion, mêlant ses effets à celui des boissons déjà ingurgitées.
Tu es encore remué par cette discussion. Ton esprit embrumé a fait un lien non annoncé entre l’homme sur la photo, de ton souvenir, et ce Major qui n’a jamais parlé d’un quelconque lien de parenté. Désormais, tu es persuadé que les deux hommes sont de la même famille.
Il ne te reste pas de doutes. Une fois que tu auras atteint ton objectif, une fois que tu auras vidé les poubelles, tu te présentera face à Andersson, poings liés, prêt à recevoir le juste retour de flamme pour ton crime.
Il te remercie, mais cela te passe au dessus, tu fais simplement un signe de tête pour indiquer que tu as remarqué qu’il te parle. Ce n’est qu’ensuite qu’il s’éloigne d’un pas lent. Une fois qu’il a disparu de ton champ de vision, tu continue de tirer sur cette cigarette offerte, alors même qu’elle est déjà entièrement consumée.
Cette constatation, après avoir atteint ton esprit, te pousse à toi aussi t’éloigner du bâtiment afin d’aller acheter un paquet, le premier d’une longue série.
Ce n’est qu’une fois ton erreur validée, l’essai transformé, que tu reviens t’adosser à ce mur een allumer une seconde, attendant ta fiancée.
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